L'Opération Georgette
Le musée s'attachera à expliquer, notamment par des photos et des cartes, la bataille du Mont Kemmel et, plus largement l'opération Georgette qui est résumée ci-dessous.
L'Opération Georgette était la seconde des cinq offensives majeures planifiées par le général Ludendorff pour le printemps 1918. A la fin de l'année 1917, l'Etat-Major allemand était conscient que la situation générale de l'Allemagne se dégradait et que les chances de gagner la guerre s'amenuisaient. Le blocus entrepris par la marine britannique a entrainé une dramatique pénurie de denrées alimentaires et de matières premières. En 1917, le traité de paix signé avec la Russie a permis un report de grandes quantités de troupes et d'approvisionnements vers le front occidental, rendant possible un ultime effort des armées allemandes.
Cet effort constituait vraiment la dernière chance de l'Allemagne; elle perdait des hommes et des ressources qu'elle n'était plus capable de remplacer. En revanche, les Alliés se renforçaient grâce à un afflux croissant de personnel et d'approvisionnements venant d'Amérique. Ainsi, à la fin de la guerre, les Etats-Unis avaient déployé deux millions d'hommes en Europe et deux autres millions étaient à l'instruction.
La population allemande et, dans une moindre mesure, les militaires commençaient à souffrir de privations; ainsi la ration quotidienne des civils était réduite à 1.000 calories. Les seules solutions possibles étaient soit de négocier un traité de paix, soit de tenter un dernier coup de dés qui permettrait de gagner la guerre. Ludendorff pensait en outre que si l'issue n'en était pas la victoire, cela permettrait au moins d'engranger des gains territoriaux; l'Allemagne serait alors en meilleure position pour négocier. Diverses offres de paix avaient d'ailleurs été faites, qui ont été rejetées par Ludendorff.
L'Opération "Georgette" représentait une partie de ce dernier coup de dés. Elle a aussi été un des derniers succès majeurs des Allemands avec la prise d'une position stratégiquement importante, le Mont Kemmel. Elle a été constituée d'une série de batailles très mobiles lors desquelles les Alliés ont perdu une grande partie du terrain qu'ils avaient conquis à grand frais durant les trois années précédentes. L'opération s'est déroulée durant trois semaines, entre le 9 et le 29 avril 1918. La bataille du Mont Kemmel a été considérée par certains vétérans français comme plus dure et plus destructrice que celle de Verdun. Durant cette courte période, les pertes totales de l'ensemble des belligérants ont dépassé le chiffre de 190.000, réparti approximativement en 76.000 Britanniques, 30.000 Français et Belges et 86.000 Allemands. Malgré cela, cette bataille est très peu connue.
L'objectif des Allemands était de s'emparer de Bailleul et du noeud ferroviaire d'Hazebrouck puis de continuer vers les ports de Calais et de Dunkerque essentiels pour les Britanniques, en séparant les armées française et anglaise. Pour les Allemands la prise d'Ypres assurait la couverture de leurs bases navales de Zeebruges et d'Ostende; celles-ci étaient convoitées par les Britanniques qui cherchaient à les neutraliser afin de protéger leurs convois de navires amenant le ravitaillement de leurs force expéditionnaire.
Du temps de la Première Guerre mondiale, tout noeud ferroviaire avait une grande importance stratégique car le chemin de fer était le moyen de transport le plus efficace pour acheminer les troupes et le ravitaillement; le réseau routier et le parc de camions automobiles n'étaient pas suffisamment développés. Si les ports de la Manche étaient perdus, l'acheminement des munitions, de la nourriture et, plus grave encore, des troupes fraiches venant d'Amérique aurait été compromis, de même que l'évacuation sanitaire des blessés vers les hôpitaux du Royaume-Uni. En conséquence, le noeud ferroviaire d'Hazebrouck était vital pour le ravitaillement de l'armée britannique du saillant d'Ypres.
La première offensive allemande au printemps 1918 a été l'Opération "Michaël" qui s'est déroulée du 21 mars au 5 avril. Son objectif principal était de prendre le noeud ferroviaire d'Amiens. Si soit Hazebrouck, soit Amiens était perdue pour les Alliés, les Britanniques auraient été sérieusement affaiblis; si les deux avaient été pris, cela leur aurait été fatal.
Carte des principales lignes de chemin de fer (en rouge) en Belgique et dans le Nord de la France en 1918. On y voit les axes de l’attaque allemande du 9 avril (flèches) et les zones conquises à la fin de l’offensive, le 29 avril.
Le déroulement de l'Opération Georgette vu par les Alliés:
9 avril : Après un bombardement intense, la 6ème Armée allemande attaque entre Givenchy et Fleurbaix et écrase les Portugais à La Bassée.
10 avril : La 4ème Armée allemande attaque entre Fleurbaix et Frelinghien (au nord-est d'Armentières). Estaires, Steenwerck, Armentières, Ploegsteert, Messines et le lieu-dit Oosttaverne tombent. Bien que Foch pense encore que cette attaque constitue une diversion, par précaution, il fait glisser vers le nord sa 10ème Armée, suivie de sa 5ème Armée, conscient des conséquences tragiques de la perte des ports de la Manche s'il se trompe. A la fin de la journée, les Allemands ont capturé 11.000 prisonniers et 146 pièces d'artillerie.
11 avril : Le maréchal Haig proclame son ordre resté célèbre "Dos au mur ..." et demande qu'un renfort de quatre divisions françaises soit envoyé à la 2de Armée (britannique) de Plumer afin de protéger Hazebrouck. Foch accepte.
12 avril : Les Allemands parviennent à 5 kilomètres d'Hazebrouck. A midi, Ludendorff donne l'ordre de porter l'effort principal sur Bailleul; cela laisse aux Britanniques un répit permettant de renforcer Hazebrouck.
13 avril : Les Allemands ont une mauvaise journée : ils n'arrivent pas à conquérir un seul des objectifs prévus. La 1ère Division australienne et la 4ème Brigade des Gardes tiennent solidement Hazebrouck. Ludendorff réoriente ses troupes vers les collines du Mont Kemmel et du Mont des Cats avec l'intention d'encercler Ypres.
14 avril : Wulverghem est perdue. Foch est nommé Commandant suprème des forces alliées. Des grandes unités françaises, les 28ème et 133ème divisions d'infanterie et le IIème Corps de cavalerie, passent sous le commandement de Plumer et reçoivent la mission de défendre le Mont Kemmel.
15 avril : La situation est devenue tellement désastreuse que le village de Passchendaele, si durement conquis, est évacué afin de raccourcir la ligne de front devant Ypres. Cela permet de récupérer des troupes qui sont engagées dans la bataille, parfois appelée la 4ème bataille d'Ypres.
16 avril : Méteren, Bailleul et Wijtschaete sont perdues.
17 avril : Au nord d'Ypres, les Allemands attaquent la ligne tenue par les Belges entre Langemark et Merckem avec l'intention de les couper de la 2de Armée britannique et d'encercler Ypres. L'assaut est brillamment repoussé par la défense belge. L'Opération Georgette commence à s'essouffler.
19 avril : Le Mont Kemmel est attaqué mais résiste. Les Allemands sont épuisés et marquent une pause.
25 avril : Au cours d'un dernier effort, les Allemands s'emparent du Mont Kemmel et de Dranoutre.
Le 29 avril, les Allemands investissent brièvement Locre et sont arrêtés devant Voormezele, le lieu-dit Hellfire correct? corner, Potijze, Wieltje et Merckem I think Merckem is better than Merkem. Ludendorff ordonne la fin de l'offensive.
Les Allemands occupent la région jusqu'à la fin août et évacuent le Mont Kemmel et Dranoutre le 29 du mois. Le village commémore sa libération chaque année à cette date (information sur demande).